Conduire après usage de CBD ?
Conduire après usage de CBD ?
Avec Maître PUJOL Adrien – Avocat à la Cour basé à Rennes et diplômé en droit routier
Conduire après usage de CBD ?
Conduire après usage de CBD pose encore et toujours question en l’état de notre Droit.
Récemment, la Cour de cassation par un arrêt rendu le 25 janvier 2023 est précisément venue casser un arrêt rendu par la Cour d’appel de Rennes en la matière.
Conduire après usage de CBD en Bretagne peut être couteux et dangereux.
Mais des voies de droit existent malgré tout.
En pratique, les conductrices ou conducteurs sont contrôlés sur les routes de Bretagne, à Vannes, à Rennes, à Saint-Brieuc ou encore Saint Malo ou Brest et se sentent parfaitement aptes à conduire.
Leurs réflexes et leur vision de la route ne leur semble souffrir aucune difficulté.
Le problème : en cas de contrôle (test salivaire) positif au THC, les forces de l’ordre procèdent à un prélèvement salivaire, en demandant au conducteur de prélever lui-même sa propre salive.
Depuis une loi promulguée en 2016, c’est donc le prélèvement salivaire quoi fait foi (sauf impossibilité technique matérialisée ou accident de la route) et sert à déterminer la présence ou au contraire l’absence de trace de stupéfiants dans l’organisme du conducteur.
Et un arrêté officiel publié par le Conseil des Ministres a permis d’expliciter techniquement la façon dont les contrôles salivaires devaient avoir lieu au bord de nos routes.
D’après l’article L235-2 du code de la route :
(…)
Les officiers ou agents de police judiciaire de la gendarmerie ou de la police nationales territorialement compétents à leur initiative et, sur l’ordre et sous la responsabilité des officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire adjoints, peuvent également, même en l’absence d’accident de la circulation, d’infraction ou de raisons plausibles de soupçonner un usage de stupéfiants, procéder ou faire procéder, sur tout conducteur ou tout accompagnateur d’élève conducteur, à des épreuves de dépistage en vue d’établir si cette personne conduisait en ayant fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants.
Article R235-4 du même code :
Version en vigueur depuis le 27 août 2016
Modifié par Décret n°2016-1152 du 24 août 2016 – art. 1
Les épreuves de dépistage réalisées à la suite d’un recueil de liquide biologique sont effectuées conformément aux méthodes et dans les conditions prescrites par un arrêté des ministres de la justice et de l’intérieur ainsi que du ministre chargé de la santé, après avis du directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.
Aux termes de l’article R. 235-10 du code de la route : » Les analyses des prélèvements salivaires et sanguins sont conduites en vue d’établir si la personne conduisait en ayant fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants. Elles le sont dans les conditions définies par l’arrêté prévu à l’article R. 235-4. « . Enfin, aux termes de l’article R. 235-11 de ce code : » Dans un délai de cinq jours suivant la notification des résultats de l’analyse de son prélèvement salivaire ou sanguin, à condition, dans le premier cas, qu’il se soit réservé la possibilité prévue au deuxième alinéa du I de l’article R. 235-6, le conducteur peut demander au procureur de la République, au juge d’instruction ou à la juridiction de jugement qu’il soit procédé à partir du tube prévu au second alinéa de l’article R. 235-9 à un examen technique ou à une expertise en application des articles 60,77-1 et 156 du code de procédure pénale. De même, le conducteur peut demander qu’il soit procédé, dans les mêmes délais et conditions, à la recherche de l’usage de médicaments psychoactifs pouvant avoir des effets sur la capacité de conduire le véhicule.
D’autre part, aux termes de l’article 3 de l’arrêté du 13 décembre 2016 fixant les modalités du dépistage des substances témoignant de l’usage de stupéfiants, et des analyses et examens prévus par le code de la route : » I. – Le dépistage, à partir d’un recueil salivaire, est réalisé au moyen de tests salivaires respectant les seuils minima de détection suivants : 1° S’agissant des cannabiniques : – 9-tétrahydrocannabinol (THC) : 15 ng/ml de salive () « . Aux termes de l’article 10 du même arrêté : » Les analyses sont exécutées avec des matériels et des méthodes respectant les seuils minima de détection suivants : / I. – En cas d’analyse salivaire : / 1° S’agissant des cannabiniques : / – 9-tétrahydrocannabinol (THC) : 1 ng/ml de salive (ou équivalent) () « . Aux termes de l’article 12 de l’arrêté : » Les analyses ou examens biologiques prévus aux articles R. 235-5 à R. 235-10 du code de la route sont effectuées par : / 1° Un médecin ou un pharmacien exerçant dans un laboratoire de police scientifique ; / 2° Un expert inscrit en toxicologie dans l’une des listes instituées en application de l’article 2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires et à l’article 157 du code de procédure pénale, dans les conditions prévues par l’article R. 3354-20 du code de la santé publique ; / 3° Un biologiste médical d’un laboratoire de biologie médicale répondant aux conditions fixées par les articles L. 6213-1 et L. 6213-2 du code de la santé publique ; / Ces personnes doivent justifier de travaux et d’expérience dans les activités de toxicologie ou d’une pratique des analyses en toxicologie médico-légale d’au moins trois ans « .
L’arrêté dispose que :
« Le prélèvement doit être effectué par le conducteur lui-même, sous le contrôle de l’officier ou l’agent de police judiciaire. »
Le prélèvement doit ainsi être effectué par le conducteur lui-même.
Notre articlé précédent sur la question du contrôle en matière de stupéfiants :
Voir l’arrêt de la Cour de Cassation ci dessous reproduit :
25 JANVIER 2023
CASSATION
Motifs
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
Dispositif
M. [K] [V] a formé un pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel de Rennes, 10e chambre, en date du 1er juin 2022, qui, pour conduite après usage de stupéfiants, l’a condamné à quatre-vingt-dix jours-amende à 7 euros.
Un mémoire personnel a été produit.
Sur le rapport de M. Turbeaux, conseiller, et les conclusions de Mme Mathieu, avocat général, après débats en l’audience publique du 14 décembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Turbeaux, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le tribunal correctionnel a condamné M. [K] [V], pour conduite après usage de stupéfiants, à trois mois d’emprisonnement, et a prononcé une mesure d’annulation du permis de conduire.
3. M. [V] a relevé appel et le ministère public a formé appel incident.
Examen des moyens
Sur les premier et second moyens
Enoncé des moyens
4. Le premier moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a condamné M. [V] pour conduite après usage de stupéfiants, alors qu’il lui appartenait, après avoir fait droit à l’exception de nullité soulevée par le prévenu relative au prélèvement salivaire, de décider si l’annulation devait être limitée à tout ou partie des actes ou pièces de la procédure viciée ou s’étendre à tout ou partie de la procédure, qu’en ne prononçant pas à cet égard, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences de sa décision et a violé les articles 174 et 802 du code de procédure pénale.
5. Le second moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a condamné M. [V] pour conduite après usage de stupéfiants, alors qu’en se fondant sur le résultat du dépistage salivaire, dont elle avait pourtant prononcé la nullité, pour retenir la culpabilité du prévenu, la cour d’appel a méconnu l’article 485 du code de procédure pénale.
Réponse de la Cour
6. Les moyens sont réunis.
Vu les articles 174 et 593 du code de procédure pénale :
7. Il résulte du premier de ces textes que, lorsque la cour d’appel constate la nullité d’un acte de la procédure, doivent être annulées par voie de conséquence les pièces qui ont pour support nécessaire l’acte vicié.
8. Selon le second, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
9. Pour déclarer le prévenu coupable de conduite après usage de stupéfiants, l’arrêt attaqué, après avoir annulé l’opération de dépistage salivaire, retient que des éléments probatoires résultant des résultats positifs à la détection de cannabis de l’analyse du prélèvement salivaire démontrent que le conducteur du véhicule a commis l’infraction de conduite en ayant fait usage de substances stupéfiantes.
10. En déduisant ainsi la culpabilité du prévenu du résultat d’une opération de dépistage salivaire qu’elle avait annulée, la cour d’appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé.
11. La cassation est par conséquent encourue.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Rennes en date du 1er juin 2022, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Rennes, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Rennes et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille vingt-trois.
Conduire après usage de CBD ?